Scerbanenco, Giorgio « Les Enfants du massacre,» (1968 – traduction 2024) 304 pages – Série Duca Lamberti tome 03

Auteur : (Source Wikipédia) Giorgio Scerbanenco, né Volodymyr-Djordjo Chtcherbanenko (en ukrainien : Володимир-Джорджо Щербаненко) à Kiev le 27 juillet 1911 et mort à Milan le 27 octobre 1969, est un écrivain de polar italien. Il est né en Ukraine, à Kiev, de mère italienne et de père ukrainien. Il arrive en Italie, à Rome, avec sa mère à l’âge de six mois. En 1917, lors de la révolution russe, tous deux retournent en Russie pour retrouver leur mari et père, mais celui-ci a été fusillé par les bolcheviques. Il rentre donc avec sa mère en Italie, d’abord à Rome puis, à seize ans, à Milan. Il est alors orphelin. Il arrête très tôt ses études pour des raisons financières. Sans diplôme, il gagne sa vie péniblement en acceptant des emplois mal payés de manœuvre, de balayeur ou de magasinier. Les privations, la malnutrition et une santé très fragile entraînent son hospitalisation dans un sanatorium à Sandrio, près de la frontière suisse. C’est pendant ce repos forcé qu’il se met à l’écriture de plusieurs nouvelles publiées à partir de 1933. Auparavant, il commence à collaborer à des journaux féminins, d’abord comme correcteur, puis comme auteur de nouvelles et de romans à l’eau de rose, ainsi qu’au courrier du cœur. Il écrira également des westerns et de la science-fiction.
Il publie son premier roman policier Sei giorni di preavviso en 1940, c’est le premier d’une série qui sera republiée dans Cinque Casi per l’Investigatore Jelling.
En 1943, il se réfugie en Suisse où il restera jusqu’en 1945. Il passe d’abord par le camp de réfugiés de Büsserach puis est accueilli, dans le canton du Tessin, par des amies suisses de son épouse, Teresa. Pendant son exil il écrit un roman Non rimanere soli qui en transpose l’expérience bien qu’il ait dû, comme il l’écrit lui-même dans l’avis au lecteur (al lettore) qui précède le roman, obéir aux prescriptions minutieuses de la police du pays dans lequel il a passé ses années d’exil et se contraindre à une neutralité hypersensible (ipersensibile neutralità) et donc à changer les noms des personnes et des lieux. C’est également en Suisse qu’il écrira Lupa in convento, Annalisa e il passagio a livello, Tecla e Rosellina ainsi qu’un roman de science-fiction — qualifié de sombre (cupo) par sa fille Cecilia dans l’avant-propos du recueil intitulé Annalisa e il passagio a livello contenant la nouvelle de même titre et Tecla e Rosellina, publié en 2007 par Sellerio à Palerme.
La renommée internationale intervient avec la série des Duca Lamberti — quatre romans dont Vénus privée, adapté à l’écran par Yves Boisset sous le titre Cran d’arrêt en 1970. Il y dépeint une Italie des années 1960 difficile, parfois méchante, désireuse de se développer mais désenchantée, loin de l’image édulcorée et brillante de l’Italie du boom économique.
Il obtient le grand prix de littérature policière en 1968.
Il peut être considéré comme un des maîtres des écrivains italiens de romans noirs à partir des années 1970.
Depuis 1993, le prix Scerbanenco récompense le meilleur roman policier ou noir italien publié l’année précédente. Ce prix est décerné lors du Festival du film noir de Courmayeur.
Série La trilogie de la mer : Le Sable ne se souvient pas, Mort sur la lagune, Les Amants du bord de mer)
Série Duca Lamberti : Vénus privée (tome 1) – À tous les rateliers / Ils nous trahiront tous / Tous des traîtres (tome 2- Grand prix de littérature policière 1968) – Les Enfants du massacre, (tome 3) – Les Milanais tuent le samedi (tome 4)
Rivages/noir 16.11.2011 – 2654 pages/ Gallmeister – Totem (poche) 04.17.2024 – 304 pages – nouvelle traduction par Laura Brignon (Titre original : I Ragazzi Del Massacro)
Résumé :
Une salle de classe, un tableau noir recouvert de dessins obscènes, et le cadavre d’une femme entièrement nue, atrocement battue. La victime est Matilde Crescenzaghi, jeune institutrice dans une école du soir fréquentée par onze garçons particulièrement difficiles.
Les élèves sont les premiers suspects, mais face à la loi du silence l’enquête semble au point mort. Duca Lamberti est prêt à tout pour résoudre cette affaire d’une violence hallucinante.
Entre interrogatoires et rencontres interdites, le détective entame une véritable descente dans l’Italie des laissés-pour-compte et des marginaux.
Ce roman a paru en Italie en 1968. Il est à lire dans le contexte de l’époque.
Mon avis:
Une enseignante martyrisée, violée et tuée, 11 élèves délinquants, l’interrogatoire des 11 jeunes qui débitent tranquillement des mensonges.
Ceux qui connaissent déjà le personnage de Duca savent qu’il ne voit pas les choses de la même manière que les policiers traditionnel. En effet il a été médecin avant de collaborer avec la police en tant que policier et qu’il a de ce fait une stratégie d’interrogatoire bien particulière, des méthodes qui sont les siennes; Il utilise la violence verbale et l’on ne peut donc pas accuser de maltraitance sur mineurs car il ne les brutalise pas physiquement , des méthodes psychologiques qui lui sont propres. Il déstabilise les personnes qu’il a en face de lui.
Une approche particulière, basée sur la confiance et le lien qu’il veut établir entre lui et les jeunes, car il est persuadé que c’est le seul moyen de découvrir la vérité. Mais pas facile d’établir une relation de confiance avec des jeunes qui ont peur, surtout quand on fait partie de la police. Parmi ces jeunes un garçon semble plus fragile, car il s’avère qu’il est « inverti » et que cet état de fait le terrorise et qui parait moins dangereux que les autres…
Duca va creuser dans le contexte familial et social des 11 coupables potentiels – tous mineurs âgés de 13 à 18 ans…
Encore une fois l’enquête et l’approche de Duca vont se révéler passionnantes.
Même si cette enquête peut se lire sans avoir lu les deux tomes précédents, ce serait vraiment dommage de ne pas suivre le personnage depuis le début.
Scerbanenco reste pour moi le maître absolu des auteurs de « gialli » italiens. Pas étonnant que le Prix Scerbanenco récompense chaque année le meilleur roman policier ou noir italien.
Extraits:
Ces hurlements secouèrent le gamin : simple effet de la violence des ondes sonores.
Il baissa l’abat-jour pour ne pas éblouir l’adolescent et lui permettre de mentir plus à son aise dans la pénombre. Il aimait s’entendre raconter des histoires et laisser croire à ces misérables qu’ils avaient réussi à le tromper.
Les mensonges font toujours l’effet d’une fausse note, d’un couac, et ce gamin avait dit quelque chose d’harmonieux, qui sonnait juste.
Personnellement, il n’aimait pas Duca Lamberti. Il creusait trop, il était capable de faire un traité de philosophie à partir d’un modeste vol à la tire dans un supermarché, pour sa part il préférait le noir et le blanc, le dehors et le dedans, pas les subtilités à la Whitehead. Cependant, il acceptait la vérité, même si elle arrivait par un chemin différent, tapissé de ces subtilités qu’il détestait.
Tu connais l’étymologie d’“hystérie” ? Sûrement, mais tu ne t’en souviens pas. Ça vient du grec ystérikos, et du sanscrit ustera, qui désigne une partie profondément féminine.
— J’ai saisi, développe.
— Une partie profondément féminine, disais-je. Et selon certains philologues, “histrion” a la même origine.
Comme la chasse, attraper des voleurs demande de la patience et de la ferveur. Quand quelqu’un parle, laissez-le parler, dans son discours fluvial, on peut finir par trouver la pépite d’or de la vérité, et ils attendaient de la voir briller dans cette marée de mots.