SYLVIE GERMAIN

Je l'ai découverte dès la sortie de son "Le livre des nuits"... et j'ai ensuite dégusté son oeuvre ( sauf Vermeer). .. Pour moi son incontournable reste le "livre des nuits" mais "la chanson des mal-aimants", " Tobie des Marais", "la pleurante des rues de Prague"... enfin tous.. J'apprécie tout particulièrement le rôle des couleurs dans son oeuvre. Il y a la violence des mots et des situations, en accord avec la couleur des ciels et de la terre, la lueur d'espoir avec encore des références à la lueur et la lumière..
Souvent à la frontière du roman, de la réalité et du conte fantastique, une écriture envoûtante, forte, et fluide à la fois. Un bijou

La revue de presse de Radio France 
Sylvie Germain ne s'embarrasse d'aucune métaphysique absconse. Son histoire se lit comme un conte, mélange de merveilleux concret et de sacré ... En acceptant de plonger avec Tobie, en faisant confiance à l'auteur, à son affabulation mystique, on traverse un grand questionnement foisonnant. C'est cosmique et tenté par la grâce, ni plus ni moins ! 
(Patrick Grainville, Le Figaro, 11/06/1998)

Du passé au présent, Sylvie Germain soulève le poids qui pèse sur toute vie et en appelle aux anges pour l'aider. Suivant un sentier parallèle au livre de Tobie, elle prend sa liberté d'écrivain ... Son génie, c'est l'image, la puissance évocatrice du trait qui en appelle à la peinture et fait que certaines scènes nous poursuivent longtemps après la lecture, continuent à vivre d'une vie propre, hors du roman. Sans doute est-ce là la marque d'un vrai romancier. Et le charme lourd de ce livre étrange. 
(Laurence Liban, Lire, 01/06/1998)

Avec son "Tobie des Marais", Sylvie Germain se livre à un exercice dont on connaît les difficultés dans la mesure où il a été souvent pratiqué. Du "Livre de Tobie", elle tire un roman. A la rugosité du texte biblique, ce que certains préféreront sans doute, elle substitue une grande envolée lyrique, un remarquable travail d'écriture ... En refermant le livre, autant et davantage peut-être que la fable biblique ou l'éternelle histoire de l'innocent persécuté, ce qui demeure, c'est que l'imagination rencontre parfois des êtres rayonnants, nommés Déborah, Sarra, Tobie ou Raphaël. On se souviendra également qu'il est une région de France que Sylvie Germain porte dans son coeur : un bout du Marais Poitevin, de la côte vendéenne, avec l'océan qui s'y brise. Elle fait de ce lieu une sorte de 'wonder land' qui gratifie ses personnages d'une relation privilégiée avec les éléments, dont la raison raisonnante est impuissante à rendre compte. 
(Agnès Vaquin, La Quinzaine Littéraire, 01/06/1998)

Ne pas se tromper : ce "Tobie des marais", librement inspiré de la Bible, n'est pas un essai métaphysique mais d'abord un roman à lire d'un trait, simplement porté par les histoires qu'il enchaîne. Sylvie Germain, la conteuse des nuits, la guetteuse de grâce et d'immensités, sait aussi mener son monde. Cela dit, mieux que bien d'autres, elle parle du bien, du mal, du combat de l'homme et de son cheminement vers lui-même. Enfin, son univers poétique fait sourdre des ruisseaux d'eau claire. Et quand elle organise, dans un crépuscule doré, une cérémonie d'adieux entre une grand-mère et son petit-fils, elle touche au sublime. 
(Dominique Mobailly, La Vie, 14/05/1998)

Dès son premier roman, "Le Livre des nuits", Sylvie Germain avait exprimé la volonté de faire rompre ses digues à la réalité, afin d'opposer une symbolique et dérisoire barricade de mots à la démence d'un siècle où la barbarie, quelle que soit sa parure idéologique ou guerrière, a su trouver ses aises. Aujourd'hui, dans "Tobie des marais", un récit librement inspiré du livre de Tobie de l'Ancien Testament, la violence enrobée de douceur de cette romancière imprime son souffle à des personnages qui, pour la plupart, sont comme cernés par la mort. 
(Pierre Drachline, Le Monde, 08/05/1998)

Les personnages de "Tobie des marais" portent en eux la mort des autres ... Deborah est juive polonaise. Après avoir perdu ses parents et son frère, elle s'installe au coeur du marais poitevin avec son mari, ses filles et ses petits-enfants. Mais la Première puis la Deuxième Guerre mondiales éclatent. Emportant son mari et ses deux filles. Et - pour beaucoup d'entre nous - Dieu ... Deborah a quatre-vingt-treize ans quand le malheur frappe à nouveau les siens. A la suite d'une chute de cheval, Anna est retrouvée morte décapitée. Son mari Théodore, tétanisé par la douleur, est victime d'une attaque cérébrale. Deborah quitte sa maison pour s'occuper de son petit-fils Théodore et de son arrière-petit-fils Tobie ... "Tobie des marais" est un roman enluminé par la grâce et la lumière. D'une écriture glacée dans sa beauté, Sylvie Germain raconte la marche d'un être et l'ébranlement d'une vie. Est-ce son plus beau roman ? Ses phrases semblent moins longues et plus pleines, moins recherchées et plus naturelles. Pour ce livre rempli de fulgurances et d'errances, elle s'est inspirée du récit biblique "Le livre de Tobie". Il y a des visions envoûtantes et des personnages inoubliables. 
(Marie-Laure Delorme, Le Magazine Littéraire, 01/05/1998)

Il y a un orage au début du texte, qui balaye tout et donne à un conducteur fugitif "I'impression de rouler sur une terre tout à fait inconnue, irréelle presque", mais qu'il est obligé d'accepter puisque la pluie torrentielle ne lui demande pas son avis. Le lecteur ne sait pas encore qu'il est semblable à ce voyageur et qu'il adhérera sans réserve au cauchemar fantastique que la fée Sylvie Germain rend réel. Il y a une boule jaune sur la route, "comme si le soleil avait été précipité sur la terre", mais ce soleil est une roue de tricycle rouge, et un tout petit bonhomme de 4 ans pédale de toutes ses forces. Ce petit garçon, c'est Tobie, qui donne son nom au livre. Il recherche sa maman, "un mot magique, merveilleux..." ... A présent, le mot ne fait plus rien apparaître. Le corps mort de sa mère, Anna, est assis sur le Voltaire du salon et son père, Théodore, a dit que la jeune femme était partie "au diable" ... Ce n'est que le début du livre, dans le Marais poitevin peuplé d'oiseaux, et Sylvie Germain réussit à rendre tangible l'émotion de l'enfant et de son père. Elle relate l'histoire de Théodore et d'Anna, que vingt ans séparent sans que la différence d'âge ne soit un obstacle, et qui se sont rencontrés par l'intermédiaire d'une cabine téléphonique. Car le roman est réaliste, sinon il ne nous effrayerait pas. 
(Anne Diatkine, Libération, 30/04/1998)

Avec "Tobie des marais", Sylvie Germain livre son roman à la fois le plus mystique et le plus violent. Ce n'est pas une mince gageure que de déraper vers le surnaturel tout en restant pleinement, fortement romancière. Le titre, en référence à la Bible, prévient que l'histoire qu'elle entreprend de raconter a ses racines dans le ciel. Mais aussi ses pieds sur la terre, et comment ! englués dans la glaise, dans la boue des marais poitevins. Tobie pour la signification symbolique de l'intrigue, les marais pour la pâte dont celle-ci est pétrie ... Une aïeule juive dont toute la famille a été massacrée, et les morts dissous ou abandonnés sans sépulture ; un accident de cheval qui décapite la cavalière ; une jeune fille marquée d'un sceau fatal, puisque les garçons qui s'en éprennent périssent l'un après l'autre dans des circonstances inexplicables : à cet amoncellement de crimes et de désastres fait à peine contrepoids l'apparition de Raphaël, plus ange qu'éphèbe, comme son nom l'indique. Il emmènera Tobie, arrière-petit-fils et rescapé de la famille juive, à la rencontre de Sarra/Sarah, la belle maudite, et par l'union amoureuse des deux jeunes gens adviendra la rédemption de cet univers de damnés. Mais encore une fois rien de facile, rien de mièvre dans ce parcours initiatique. 
(Dominique Fernandez, Le Nouvel Observateur, 23/04/1998)

Un soir de demi-brume à Nantes, Théodore a rencontré Anna. La jeune femme, de vingt ans sa cadette, "lui avait évoqué une longue flamme enclose dans la lanterne d'un phare". En réalité, c'est dans une cabine de téléphone vivement éclairée que se tenait Anna. Fasciné, foudroyé, Théodore réussira à attirer l'attention de la jeune femme, à la faire rire : ils ne se quitteront plus. Jusqu'à la mort atroce d'Anna, l'amour nourrira de son inlassable invention la flamme fragile et quotidienne de leur échange. Sylvie Germain excelle à nous faire partager l'émotion des rencontres amoureuses. Dans "Tobie des marais", son écriture de ces moments privilégiés atteint quasiment à la perfection. Avant celle de Théodore et Anna, il y a dans ce roman aux saveurs étranges - âcres tantôt, tantôt douces-amères - d'autres belles retrouvailles ... Sylvie Germain a choisi de faire travailler la pâte de son récit par le levain signifiant - proférant et proliférant - du Livre de Tobie de l'Ancien Testament. Ainsi, ce qui était écrit adviendra. Ainsi, Tobie rencontrera Sarra et la délivrera du destin mortifère qui la tient en esclavage. La référence délibérée au grand code narratif de la Bible donne au roman de Sylvie Germain une densité et une profondeur mystérieuses. Mais les pages les plus admirables sont celles où elle est parvenue à transcender ledit code, à le transgresser, en octroyant à ses personnages la liberté d'une éternelle actualité. D'une terrible modernité. 
(Jorge Semprun, Le Journal du Dimanche, 19/04/1998)

Sylvie Germain : Tobie des marais - (Folio 3336) Sous l'orage, un petit garçon file sur son tricycle. Il "va au diable", chassé par un père fou de douleur. Deux automobilistes l'aperçoivent et décodent progressivement cette apparition. Le ciel menace au-dessus : "La muraille tonna, comme un gong de désastre. Alors le schiste vira au violet-noir, puis il se lacéra. Une pluie torrentielle assaillit la terre. La visibilité tomba à zéro." Plus loin dans le marais, Théodore, le père de Tobie, cherche désespérément la tête de sa femme Anna : "Le père pendant ce temps courait à travers champs, arpentait les chemins et fouillait les fossés, les buissons. Il ne prenait garde ni aux ronces ni aux fils barbelés qui déchiraient sa veste et lui griffaient les mains."
Le livre s'ouvre comme une plaie, jure avec le paysage singulier du marais poitevin, lieu où "l'alliance entre les quatre éléments s'opérait en une si subtile et profonde harmonie." Ces pages contiennent en germe la violence du chemin de l'enfant, qu'on suivra jusqu'au dénouement. Car Tobie des Marais est avant tout la relation d'un parcours, de l'enfance à l'âge adulte, de l'obscurité à la lumière des corps.
Sylvie Germain a suivi la trame biblique, adaptant librement Le Livre de Tobie. Le personnage reste un fantôme dans la Bible, une enveloppe en attente de contenu. L'écrivain parvient ici à lui modeler un nouveau souffle. Elle y insère cette pâte humaine qui colle aux parois internes et donne de l'épaisseur. Les épisodes du récit biblique sont respectés mais revisités. Tout est affaire de regard. Il est indispensable aussi, pour rendre proche, de ramener ces figures vers notre présent, de les ancrer dans l'histoire. Au fil du récit, on suit les pérégrinations de plusieurs générations, de la vague d'immigration polonaise vers les États-Unis à la Seconde Guerre mondiale, de la guerre d'Algérie à mai 68. Ce mouvement de vies et de morts, d'inscription dans le temps, rythme chaque livre de Sylvie Germain, et son dernier roman ne fait pas exception à la règle.
L'écrivain s'attache à un être, en frôle un autre, puis tisse les liens progressivement entre eux. La structure romanesque suit les destinées, une à une. Les chapitres portent souvent le nom d'un seul. Sylvie Germain se révèle alors une fabuleuse portraitiste. On suivra par exemple Déborah, arrière-grand-mère de Tobie, femme qui "avait toujours tenu lieu de mémoire auprès des siens, vivants et défunts.." dont le "séjour sur la terre semblait n'avoir ni commencement ni fin.".
La douleur est là aussi, dans cette solitude qui peine à trouver un terme, dans la marche incessante des êtres qui ne finissent jamais de se déchirer. Car Ils son constamment tiraillés. En bas, il y a la terre, la famille qui retient, d'où l'on ne s'échappe pas sans mal. Plus loin, il y a la tentative de l'autre qui nécessite l'errance. Les personnages de Tobie des Marais sont tous en marche. Il n'est pas surprenant alors de les voir renoncer à la raison. Ils perdent la tête, confrontés à des situations extrêmes. L'image de la décapitation revient sans cesse chez Sylvie Germain. En 1997, elle avait consacré un ouvrage entier au sujet : Céphalophores (Gallimard).
Mais ce qui rend la voix incomparable, ce sont aussi les images puissantes charriées par l'univers de l'écrivain. Au fil des pages, Sylvie Germain met en place une réalité de rêve et révèle l'infini de l'humain. Dans la seconde partie du roman, l'ange Raphaël guide Tobie vers la fin de la douleur qui empoisonne sa famille, malédiction qui court depuis tant d'années, provoquant des morts atroces. Sylvie Germain montre alors comment l'homme peut parvenir à maîtriser le réel, à l'élargir aussi. Elle tient la bride d'un fantastique surgi d'une étonnante acuité du regard. Comme elle l'écrit dans un essai paru récemment sur un poète tchèque (Bohuslav Reynek à Petrkov, Christian Pirot), "Il faut regarder, regarder intensément et rêveusement le visible, pour voir vraiment, pour tout à la fois déployer et affûter sa vue et l'éblouir alors de visions, non pas de fantasmagories, d'hallucinations, mais d'images bien concrètes saturées de matière, de couleurs, de présence, et par là même infusées d'invisible, poreuses et résonnantes; ainsi le familier se révèle-t-il soudain puissamment insolite."
A la lecture, on se laisse porter par une langue pulsée et envoûtante. Loin d'être transparente, l'écriture de Sylvie Germain se situe du côté de l'oral et du conte : "Mais un jour, il fut envoyé creuser la terre en un tout autre lieu où les éléments étaient hostiles aux hommes et les hommes ennemis entre eux, où il n'y avait ni vendredi ni dimanche, où la semaine était informe, le temps pulvérisé et les jours et les nuits indistincts. La boue des tranchées ne rougissait que du sang des hommes."
Malgré tout, la seconde partie de Tobie des Marais reste moins convaincante que la première. On bascule dans le genre éprouvé du roman d'initiation. Tobie suivra un chemin sans surprise, ponctué de rencontres formatrices. C'est peut-être pour cela qu'une fois le livre refermé, on reste sur sa faim. C'est sans doute aussi parce que Sylvie Germain approfondit toujours le même livre. Elle tisse une oeuvre profondément humaine, incarnée et magique, dont Tobie des Marais n'est qu'une pièce.
© Le Matricule des Anges, ses rédacteurs et LeLibraire.com

Voici une petite liste de ses livres - avec les résumes - les commentaires suivront

Le livre des nuits
Dans la collection Folio sous le n°1806 édité par Gallimard
Parti des confins de la terre et de l'eau, Victor-Flandrin Péniel, portant au cou les larmes de son père dont le visage fut sabré en 1870 par un uhlan, et toujours accompagné d'une mystérieuse ombre blonde, viendra s'établir dans un hameau perdu au bout du territoire et encerclé de forêts où rôdent encore les loups. C'est dans ces terres frontalières, par où la guerre sans cesse refait son entrée au pays, et dans la vie et la mémoire des hommes, que Victor-Flandrin, dit Nuit-d'Or-Gueule-de-Loup, prendra femme, par quatre fois, et engendrera une nombreuse descendance, toute marquée par la gémellité et la violence de la passion.
Bien des romans d'aujourd'hui s'emploient à nous montrer les hommes et les femmes broyés par l'histoire. Mais, avec ce récit, cette terrible réalité se transfigure aux dimensions du légendaire, du conte fantastique.

Nuit d'ambre ( suite du livre des nuits)
Dans la collection Folio sous le n°2073 édité par Gallimard
Le premier mort de l'après-guerre est un enfant, Petit-Tambour, tué dans la forêt aux cours d'un accident de chasse. Et cette enfance qui a perdu son corps se fera don, — un don obscur de douleur et d'espoir, aux vivants et aux morts à venir, ainsi qu'aux arbres. Un grand if se met en marche pour prendre racine sur sa tombe ; le tourbillon de .-baies que sèmeront ses branches emportera Pauline, là mère, et le père, Baptiste, s'effacera doucement au fil des larmes sans fin versées par son corps qui sans elle ne peut vivre. Alors le second fils, Charles-Victor, dit Nuit-d'Ambre, livré à l'abandon, se voudra habité par la colère et la haine. Le roman est l'histoire de son voyage au bout du mal jusqu'à ce que, comme Jacob dans la Bible, il soit enfin terrassé par l'Ange.
Après Le Livre des Nuits, Sylvie Germain nous offre ici une oeuvre foisonnant d'épisodes étranges, dont chaque page semble traversée par un souffle d'Apocalypse et où, comme le dit Schelling, « la vérité redevient fable et là fable vérité ».

Jours de colère
Dans la collection Folio sous le n°2316 édité par Gallimard
Dans les forêts du Morvan, loin du monde, vivent bûcherons, flotteurs de bois, bouviers, des hommes que les forêts ont faits à leur image, à leur puissance, à leur solitude, à leur dureté. Même l'amour, en eux, prend des accents de colère - c'est ainsi par excès d'amour que Corvol, le riche propriétaire, a égorgé sa belle et sensuelle épouse, Catherine, au bord de l'eau - et la folie rôde : douce, chez Edmée Verselay qui vit dans l'adoration de la Vierge Marie ; ou sous l'espèce d'une faim insatiable, chez Reinette-la-Grasse ; ou d'une extrême violence, chez Ambroise Mauperthuis qui se prend de passion pour Catherine, qu'il n'a vue que morte, et qui s'empare de son corps, puis des biens de Corvol, enfin des enfants de Corvol. Il finira par perdre sa petite-fille Camille, le seul être qu'il ait jamais aimé, par excès d'amour, encore. ( Prix Femina 1989)

Opéra muet
Dans la collection Folio sous le n°2248 édité par Gallimard
Gabriel trouve la trace de ses désirs, de ses colères, de ses humeurs sur la façade du mur en vis-à-vis : une immense fresque représentant le Docteur Pierre. Il avait vu l'usure du temps oeuvrer sur cette face. Auprès de ce visage, il avait appris la patience. La plus extrême des patiences : celle qui n'attend plus rien. Un jour on commence à démolir le mur. Son paysage mental alors se gangrène, puis se décompose. La pause éternelle s'annonce.

L'enfant Méduse
Dans la collection Folio sous le n°2510 édité par Gallimard
Dans un village du Berry, une petite fille vit une enfance paisible au milieu des marais peuplés d'oiseaux, de crapauds et de fées invisibles, jusqu'à ce qu'un ogre survienne pour lui ravir son innocence, sa joie de vivre et sa bonté.


Immensités
Dans la collection Folio sous le n°2766 édité par Gallimard
Autour de Prokop Poupa, professeur de littérature réduit à l'état de balayeur dans les rues de Prague, évoluent quelques hommes et femmes marginalisés par la dissidence. Chacun, par dérision, imagine qu'un dieu Lare veille sur lui. L'un le situe dans sa cuisine, un autre sur le balcon, au grenier ou à la cave ; Prokop, lui, place son dieu Lare dans les cabinets qui deviennent un haut lieu de lecture, de méditation et de doutes. Arrive la révolution. Certains de ses amis retrouvent une place, voire de l'importance, dans la nouvelle société ; pour d'autres, il est trop tard. Prokop, lui, dérive hors de ce clivage entre l'ancien et le nouveau, il erre en solitaire dans les immensités du songe, de la folie humaine, et du silence de Dieu, jusqu'à s'échouer parfois dans des rêveries hallucinées sur la douleur de ceux qui ont été déchus du bonheur d'aimer, et plus encore sur le malheur de ceux qui ont été traîtres à l'amour. Toujours déambulant dans les rues de sa ville, entre le vides et l'espérance, Prokop ne sait plus rien sinon qu'il n'est rien, et ce constat est consentement ; il "offre ce rien dans les ténèbres", au fond desquelles peut-être gît l'inespéré.

Tobie des marais
Dans la collection Folio sous le n°3336 édité par Gallimard
Un petit garçon en ciré jaune roule sur son tricycle sous l'orage. On dirait un soleil miniature. On lui a crié "Va au diable !" et il y file, chassé par le vent du malheur. Ce dernier a une longue histoire dans la famille de Tobie où tant de morts sont restés sans sépulture, jusqu'à sa mère qui, victime d'un accident, vient de perdre la tête, au sens propre du terme. Sur l'enfant à demi orphelin veille son arrière-grand-mère Déborah qui a traversé l'histoire du siècle et l'Europe, de sa Pologne natale jusqu'au marais poitevin. Elle est une passeuse à la fois de mémoire et d'espérance. Puis un autre ange gardien accompagnera Tobie devenu jeune homme, Raphaël le nomade, qui lui révélera la force de l'amitié, et aussi celle de l'amour, en lui faisant rencontrer Sarra qui porte sa beauté comme une malédiction. Mais Tobie parviendra à briser tous les sortilèges qui pesaient sur les siens. Pour raconter cette histoire de délivrance riche en merveilleux et en émotions, Sylvie Germain s'est librement inspirée du célèbre récit biblique, le Livre de Tobie.

Eclats de sel
Dans la collection Folio sous le n°3016 édité par Gallimard
Ludvik revient à Prague après onze années d'exil. A force d'être absent à lui-même et écoeuré de tout, il s'est perdu de vue et se sent fissuré de toutes parts. Lui qui était parti pour un exil sans héroïsme ni romantisme, juste par souci d'hygiène mentale, est revenu pour fuir une femme infidèle. Entretemps, il vivote. Il survit. Il fait des rencontres étranges ... et tous lui tiennent des discours étonnants, tous lui parlent de sel, ce sel de la vie, des larmes et du sang ... L'écriture est belle, les réflexions fortes.



La pleurante des rues de Prague
Dans la collection Folio sous le n°2590 édité par Gallimard
"Cette inconnue, qui donc est-elle ? Une vision, elle-même porteuse, semeuse de visions. Une vision avare de ses apparitions. Elle ne s'est montrée que peu de fois, et toujours très brièvement. Mais chaque fois sa présence fut extrême. Une vision liée à un lieu, émanée des pierres d'une ville. Sa ville. - Prague. Jamais elle n'a paru ailleurs, bien que certainement elle en ait le pouvoir. Cette femme n'a ni nom, ni âge ni visage. Peut-être en a-t-elle, mais elle les tient cachés. Son corps est majestueux, et inquiétant. Elle est immense, une géante. Et elle boite fortement."

Chanson des mal-aimants
Dans la collection Folio sous le n°4004 édité par Gallimard
La narratrice, abandonnée à sa naissance à la porte d'un couvent, vagabondera au fil des ans d'une place à l'autre, à travers la France. C'est comme si elle n'avait pas de vie propre, mais elle participe intensément à celle des autres et aux drames dont elle est le témoin, sondant toujours plus profondément les mystères du cœur et du corps humains en lesquels rôde si souvent la folie. Elle grandit dans les Pyrénées, chez la veuve d'un fusillé, parmi des enfants qui attendent en vain le retour de leurs parents chassés par la guerre, puis dans une auberge où l'on pratique un culte étrange et truculent de l'ours, ensuite dans un manoir où pèse un secret en forme de cruelle mascarade. Devenue adulte, elle est servante dans divers hôtels, dans un bordel champêtre, dans un bistrot de gare, puis à Paris où elle côtoie des gens insolites, parfois inquiétants, et où elle finit chanteuse de rue, attelée à un orgue de Barbarie. Dans la splendide sauvagerie des montagnes et dans celle, bien plus féroce, de la ville, elle ne cessera de creuser et de fortifier sa solitude, ainsi que son don de compassion. La façon dont l'auteur donne la parole à cette paria surprend par la beauté des images, la fulgurance des visions, la violence de certaines scènes, et l'on retrouve la magie de l'écriture et de l'imagination du Livre des Nuits et de Jours de colère.

Magnus
Dans la collection Folio sous le n°45444 édité par Gallimard

L'année de ses cinq ans, Franz-Georg est tombé gravement malade et la fièvre a consumé en lui tous les mots, toutes les connaissances fraîchement acquises. Il ne lui reste aucun souvenir, sa mémoire est vide. Enfant oublieux et mutique, il doit tout réapprendre. Sa mère lui restitue son passé perdu en lui racontant l'épopée familiale par épisodes, comme un feuilleton aux multiples figures héroïques dont il est le personnage central. Ce faisant, elle le remet au monde une deuxième fois par la seule magie de la parole. Aussi séduisant que soit le récit des siens, il souffre pourtant aux yeux de l'enfant d'un défaut peu admissible : sa mère n'accorde aucune place à Magnus, son inséparable ourson au pelage râpé dont il émane une discrète et singulière odeur de roussi. Cette épopée est-elle véritablement la sienne ? Franz-Georg y réintroduit clandestinement l'oublié. D'un fragment l'autre, il reconstruit son histoire : il appartient à un peuple grandiose dont le pays est en guerre, son père exerce la profession de médecin au sein d'un grand établissement dont les patients accourent de toute l'Europe…
L'enfant, qui flotte dans un leurre magistral entretenu par sa mère, ne comprend rien aux événements qui l'entourent et vit candidement en marge du réel. Les adultes le déconcertent. Il ne comprend ni leurs préoccupations ni leurs joies, et encore moins les propos bizarres qu'il leur arrive de tenir. Pourquoi son père abandonne-t-il son uniforme et rase-t-il les murs ? Qu'est-ce qui les pousse à changer de nom, à quitter leur maison et leur cercle de connaissances ? Pour quelles obscures raisons son père s'enfuit-il un beau jour au Mexique ? Pourquoi lui, Franz-Georg Dunketal devenu Franz Keller, est-il envoyé en Angleterre auprès d'un oncle dont il n'a jamais entendu parler ? Pourquoi doit-il désormais s'appeler Adam Schmalker ? Jusqu'alors maintenu dans l'ignorance de presque tout, il découvre auprès de son nouveau tuteur la face cachée de ce Reich que célébrait sa mère et que son père avait servi avec une abjection zélée. L'âge des fables est révolu : la réalité le rattrape au collet. Incapable de se défaire du passé de son pays, il n'aura de cesse de reconstituer le puzzle familial et de percer le mystère des cinq premières années de sa vie. Si la violence de sa désillusion le confronte au mensonge, elle l'amène à l'intelligence critique et à la lucidité courageuse.
«D'un homme à la mémoire lacunaire, longtemps plombée de mensonges puis gauchie par le temps, hantée d'incertitudes, et un jour soudainement portée à incandescence, quelle histoire peut-on écrire?»
Franz-Georg, le héros de Magnus, est né avant la guerre en Allemagne. De son enfance, «il ne lui reste aucun souvenir, sa mémoire est aussi vide qu'au jour de sa naissance». Il lui faut tout réapprendre, ou plutôt désapprendre ce passé qu'on lui inventé et dont le seul témoin est un ours en peluche à l'oreille roussie : Magnus.

Les personnages
Dans la collection Folio (essai)

Un jour, ils sont là. Un jour, sans aucun souci de l'heure. On ne sait pas d'où ils viennent, ni pourquoi ni comment ils sont entrés. Ils entrent toujours ainsi, à l'improviste et par effraction. Et cela sans faire de bruit, sans dégâts apparents. Ils ont une stupéfiante discrétion de passe-muraille. Ils : les personnages. On ignore tout d'eux, mais d'emblée on sent qu'ils vont durablement imposer leur présence. Et on aura beau feindre n'avoir rien remarqué, tenter de les décourager en les négligeant, voire en se moquant deux, ils resteront là. Là, en nous, derrière l'os du front, ainsi qu'une peinture rupestre au fond d'une grotte, nimbée d'obscurité. Une peinture en grisaille, mais bientôt obsédante. Là, à la frontière entre le rêve et la veille, au seuil de la conscience. Et ils brouillent cette mince frontière, la traversent continuellement avec l'agilité d'un contrebandier, la déplaçant, la distordant. Là, plantés sur ce seuil mouvant avec la violence immobile et mutique d'un mendiant qui a jeté sur vous son dévolu et qui ne partira pas avant d'avoir obtenu ce qu'il veut

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